« Se convertir c’est se détourné de soi-même pour se tourner vers Dieu. » De toutes les définitions de la conversion que j’ai lues, celle-ci est, pour moi, la plus parlante. Elle est de Wilfrid Stinissen, un carme suédois.
En lisant cette définition, je me suis
souvenu d’une réflexion que j’avais écrite il y a quelques années pendant l’Avent.
Je vous la partage ici.
« Dans le désert, préparez le chemin du Seigneur ; tracez droit, dans les terres arides, une route pour notre Dieu. Que tout ravin soit comblé, toute montagne et toute colline abaissées ! que les escarpements se changent en plaine, et les sommets, en large vallée ! » -- Isaïe 40,3
Les montagnes, les ravins et les chemins
tortueux dans ma vie, je les construis depuis presque 70 ans. Mes montagnes
sont devenues très hautes, mes ravins très creux et mes chemins vraiment
croches ! Je suis parfois douloureusement conscient de ces obstacles à la
venue du Seigneur en moi. Toutefois, je parcours ce paysage depuis si longtemps
qu’il m’est devenu familier. J’en connais tous les recoins et tous les points
de repère. Ceux-ci m’aident à me définir, à délimiter mon identité. Je qualifie
certains d’entre eux comme étant positifs : j’ai tels talents, tels
connaissances, telles expériences vécues; je peux faire telles choses; j’ai
telles relations, tels acquis, tels rôles. Il y en a d’autres que je qualifie
de négatifs: j’ai telles faiblesses, telles limites, telles peurs, tels
défauts, telles obsessions… Mais tous, les points de repère négatifs comme ceux
qui me semblent être positifs, servent à délimiter qui je suis… et qui je ne
suis pas. J’ai ainsi déjà fait, souvent inconsciemment, un travail d’arpenteur.
Ce qu’Isaïe entrevoie avec son œil de prophète balaierait complètement ce
paysage familier et tous ces points de repères. Le travail d’arpentage serait à refaire.
Les points de références qui délimitent les
frontières de mon petit univers ont certainement des avantages. Je sais ce qui
est à moi, ce qui m’appartient. Du moins, je crois le savoir. Mais ces
frontières ont aussi de sérieux désavantages. Elles sont vulnérables, toujours
à affirmer avec vigilance et à défendre avec force si nécessaire. Je constate
que quand les événements ou des personnes viennent contester mes frontières, je
deviens facilement défensif et même agressif à l’occasion. Il n’y a pas que
monsieur Trump qui veut ériger des murs à ses frontières. Je le fais aussi. Des
murs qui me permettent de défendre mon identité, mais qui m’enferme sur
moi-même et m’isole des autres.
La seule façon de ne plus avoir de
frontières qui font obstacles à l’action de l’Esprit est de n’avoir qu’un seul
point de repère, un seul centre qui englobe tout et n’exclut donc rien. Il n’y
aurait alors plus rien à conquérir pour se créer une identité, plus rien à
défendre puisque tout serait déjà et pour toujours inclus dans ce centre. J’ai
l’impression qu’il y avait un peu de cela dans la réponse du père au fils ainé
dans la parabole de l’enfant prodigue : « Toi, mon enfant, tu es
toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. » Le seul centre
qui existe qui inclus tout et n’exclus donc rien est Dieu. Il faut que Dieu
soit le seul point de repère.
Saint Paul avait parcouru ce chemin de conversion: il avait trouvé son centre en Dieu. C’est ce qui lui permettait de dire, « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » Galates 2,20
Je crois que « entrer dans le royaume de Dieu » c’est « pénétrer » ou « se laisser pénétrer » par ce centre et là entendre le Père dire, "Tu es mon fils, ma fille bien-aimée en qui je mets toute ma joie."
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