Je suis allé voir mon frère François vendredi dernier. Comme d’habitude, il dormait. J’ai fait ce que je fais normalement : je me suis assis et je l’ai regardé en me demandant ce qu’il vivait à l’intérieur. Il est presque entièrement coupé de l’extérieur : il ne parle plus, ne reconnait plus personne et ses yeux, quand ils les ouvrent, ne se fixent sur rien en particulier. Avec le temps, j’en suis venu à croire (espérer) que ce qu’il y a de plus profond en lui, ce qui fait de lui la personne unique qu’il est, est toujours là. Alors qu’est-ce qui se passe à cette profondeur où François demeure François?
La question qui est montée dans mon cœur vendredi
dernier est celle-ci : « Quel est le sens de sa vie si,
extérieurement, elle est réduite à ses fonctions biologiques les plus
élémentaires? » Jadis, cette question aurait été accompagnée en moi de
colère, de tristesse, et même de révolte. Pas cette fois-ci. J’aime François
tel qu’il est. Il est mon frère tel qu’il est, précieux à mes yeux tel qu’il
est. Je ne doute aucunement de la valeur de la vie de mon petit frère et ce qui
a de la valeur a un sens (une direction) et une raison d’être.
Je sais que François a aimé beaucoup de
monde dans sa vie : son épouse Rita, ses frères, sa famille élargie, ses
amis, ses voisins… Cet amour-là n’est pas disparu avec ses facultés cognitives
et motrices. Un amour vrai a des racines trop profondes pour disparaître ainsi.
Ce pourrait-il que le cœur profond de François entretienne un dialogue
incessant avec cet amour? J’ose espérer que oui. Cette amour demeure dans le cœur
de François et l’habite toujours. François n’a pas cessé d’envelopper de son amour ceux qu’il aimait et
qu’il aime toujours. Voilà la raison d’être de François, le sens de sa vie.
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