Monday, 17 June 2024

Creative writing class

 

I had a crazy dream last night. Not a nightmare this time, but a strange one that made me wonder, “Why would my subconscious need to manufacture such quirky fantasies to keep me sane during the day?”

In this dream, I was taking a creative writing class in English and the classroom or hall where this took place was also used by a jazz band. The seven musicians had a practice just before my class started and they would sometimes take longer than the time they were allotted. I didn’t mind because I like jazz and a 15-minute mini-concert was enjoyable.

The first hour of our very first writing class consisted of learning how to write in cursive. This being a dream, I didn’t question the legitimacy or need for such a lesson in a creative writing class. I did, however, find the lesson rather stressful because my handwriting has never been very elegant at the best of times and my ability to write by hand has decreased considerably with age.

The second task the teacher assigned was interesting and challenging. He provided us with a long list of words. We were to choose one of them as the theme of a four-hundred-word paragraph. I did not find it strange or inappropriate that he would ask us to write such a lengthy paragraph – critical thinking is obviously not a forte of my subconscious. What made the assignment challenging, was that we were to write this in the shape of a Christmas tree: one letter for the very first line, three letters and/or spaces for the second line, five for the third line, and so on. In addition to this directive, we were told that we could not use an “i” at the beginning of any of the lines.  The theme I chose from the list provided was “butter”. Mercifully, I did not get very far into this crazy assignment before waking up. This is as far as I got:

A
bit
or so
of soft
or frozen
nice butter

Where in the world did my mind gather the material for this dream? I did have a conversation with my daughter Geneviève yesterday. We talked about her blog, and I told her that I was impressed with her writing skills. She does write very well. Don’t take my word for it and check it out: https://mmehawtree.blogspot.com/ . Her blog is so good in fact that one of her articles was quoted in a CTVNews broadcast in 2014 (https://www.ctvnews.ca/canada/striking-b-c-teacher-blogs-confession-1.1839835). The image at the top is from her latest blog article and deals with teaching children how to form letters. I should take a class with her to learn how to write in cursive!

Geneviève told me that I shouldn’t be surprised about her proficiency in writing, because “I am my father’s daughter after all.” I am very proud of her and that comment was the greatest of Father’s Day presents.

Saturday, 15 June 2024

Un coeur qui écoute


Il m’arrive d’être en train de lire quelque chose, de m’arrêter et de me demander, « Qu’est-ce que je viens de lire? » Pour quelques secondes, mon esprit s’étant mis à vagabonder, j’ai lu des mots dans un paragraphe entier sans que mon cerveau en saisisse le sens. Je dois alors reprendre la lecture du paragraphe en faisant un effort pour « écouter » ce qu’il me dit.

Je constate qu’il est possible de vivre des portions entières de ma vie de la même façon. Je traverse des journées pendant lesquelles j’éprouve des événements douloureux ou joyeux, stressants ou captivants, banals ou intenses sans m’arrêter pour me demander, « Qu’est-ce que je viens de vivre? » Comme pour ces paragraphes dans mes lectures distraites, il faut alors que je « relise » mon vécu en « écoutant » attentivement ce qu’il a à me dire.

Cette relecture, je la fais à l’aide de la parole. Je mets des mots sur ce que j’ai vécu pour cerner la signification des événements de ma vie. Sans cela, mes journées et tout ce qu’elles contiennent s’enfuient et se perdent comme si elles n’avaient rien à dire, rien à me révéler du sens profond de ma vie. N’est-ce pas la définition même du mot « insensé? »

La Parole de Dieu m’aide aussi à faire une relecture de mon vécu pour en dégager le sens profond. Elle m’aide à me mettre à l’écoute de cette vie que Dieu m’a donné de vivre pour en découvrir le sens. Mon vécu quotidien, du geste ou de l’événement apparemment le plus banal à ceux qui semblent avoir plus de poids, ne se perd plus dans des culs-de-sac qui ne débouchent nulle part. La Parole donne un sens à chaque moment de mon vécu. Elle lui donne une direction.

Seigneur, donne-moi un coeur qui écoute. Que ta Parole éclaire mes sentiers.

Monday, 28 August 2023

Prier le Notre Père


La parole de Dieu est une semence qui porte le fruit que Dieu veut qu’elle porte :

« La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, donnant la semence au semeur et le pain à celui qui doit manger ; ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission. » Isaïe 55, 11-12

 Quand je prie le « Notre Père », c’est sur cela que je m’appuie. Je ne dis pas seulement les mots d’une prière apprise par cœur dans mon enfance. Je laisse cette parole de Dieu, celle que Jésus nous a donné en cadeau, pénétrer en moi et dans tout ce que je vis. Cette prière est la graine plantée qui est en train de germer et portera incontestablement son fruit en son temps parce que Dieu est fidèle et n’abandonne jamais l’oeuvre qu’il a déjà entamée. Dire le « Notre Père » c’est accueillir Dieu et tout ce qu’il fait pour nous.

Au commencement, il suffisait à Dieu de dire, « Que la lumière soit. » Et elle fut.

Aujourd’hui encore, il nous suffit de redire avec Jésus,

« Notre Père » et nous sommes filles, nous sommes fils de Dieu;

Il suffit de demander, « Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. » et nous lui donnons la première place dans notre cœur.

Il suffit de répéter avec Jésus, « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour. » et nous sommes comblés de tout ce qui est nécessaire pour faire grandir la vie en nous.

Il suffit de prononcer les mots, « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi… » et nous entrons dans la miséricorde de Dieu.

Il suffit de murmurer, « Ne nous laisse pas entrer en tentation… délivre nous du mal. » et les ténèbres se dissipent, l’aube se pointe à l’horizon.

Prier le « Notre Père » c’est faire écho au désir le plus profond de Dieu pour nous. Comment une telle prière pourrait-elle demeurer sans réponse? 

Friday, 26 May 2023

Venez les bénis de mon Père…

J’ai longtemps pensé, comme bien d’autres le font, que cette « bénédiction » du Père était une conséquence de mes « bonnes actions », une récompense en retour de services rendus. Mais cette façon de penser est évidement une fausse perception et n’était pas celle de Jésus. L’invitation qu’il lançait sans cesse à ces disciples, et qu’il nous lance encore aujourd’hui, est celle d’aimer comme lui nous a aimé.  Cet amour-là est entièrement gratuit, « no strings attached » diraient nos amis anglophones. Il ne s’achète pas, pas même avec les meilleures des « bonnes actions. » Il ne se vend pas non plus; il n’exige rien en retour de celui qui est aimé. L’amour ne se marchande pas. Mais alors, en quoi consiste cette bénédiction dont Jésus nous parle en Matthieu 25?

Quand j’ouvre mon cœur pour accueillir la personne qui est dans le besoin, quand j’accepte d’aller à sa rencontre, j’ouvre en même temps mon cœur à Jésus qui s’identifie à cette personne : « c’est à moi que vous l’avez fait. » Un cœur ouvert à l’autre est un cœur ouvert à Dieu. Quand cette ouverture se crée, Dieu peut y verser son propre amour : « l’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit. » (Romains 5,5) Alors seulement m’est-il possible d’aimer « comme Jésus », avec son propre amour. Cet amour me pénètre, me traverse et se déverse dans la personne que je visite. C’est ainsi que je deviens un canal de cet amour.

L’héritage qui nous est offert, le « Royaume de Dieu », ne se trouve sur aucune carte géographique. Ce Royaume est là où l’Amour règne. Ce Royaume est notre cœur habité et traversé par Dieu qui est Amour. C’est cela qui est la source de notre « bénédiction », de notre bonheur. Est béni celui ou celle en qui l'Amour demeure.

Tuesday, 23 May 2023

Un coeur qui bat et qui rassemble

Dans la dernière semaine je suis allé à deux funérailles et à une fête de famille. Les trois étaient bien différents les uns des autres mais avaient tous quelque chose en commun : un cœur qui rassemblait une famille.

La célébration de vie de mon ami Pierre a eu lieu au salon funéraire du cimetière de Beechwood. Après une courte prière, son épouse, ses frères et sœurs, leurs conjoints et conjointes, les petits enfants, un prêtre ami de la famille ont tous dit quelques mots au sujet de leur relation avec lui. Ensuite, nous avons visionné un montage de photos et de vidéos. Le tout aurait pu paraitre très long mais s’est déroulé rapidement. En une heure la prise de parole de chacun, les images, la vidéo de Pierre interprétant « Toujours plus haut, toujours plus loin » de Jean-Pierre Ferland dans un spectacle amateur – tout cela dessinait peu à peu les traits du visage de mon cher ami. Je me souviendrai toujours du partage qu’a faite une de ses petites filles au sujet de son « pépère ». Elle nous a dit qu’elle croyait que chacun des petits enfants avait hérité de talents ou de qualités de leur grand-père. Elle a ensuite énuméré ceux qu’elle voyait en elle-même et dans chacun des autres petits-enfants. Ses paroles visaient juste : sa description était bien celle de celui que j’ai appris à connaitre pendant les plus de 10 ans de notre amitié.

La deuxième célébration, les funérailles de ma belle-mère Eva, s’est déroulée de façon plus traditionnelle : l’accueil des visiteurs par la famille au salon funéraire, une célébration de la parole avec eucharistie à l’église suivi d’un goûter. Pat, le fils d’Eva a fait l’éloge funèbre. En préambule, il nous a dit que sa mère l’avait averti de ne pas parler d’elle parce que ce qui comptait c’était la famille et non pas elle. Pat n’avait pas à s’inquiéter d’aller à l’encontre des souhaits de sa mère : tout ce qu’il a dit d’elle parlait en même temps de la grande famille d’Eva – il est impossible de faire autrement parce que Eva était et demeure le cœur vivant de cette famille. Elle sera toujours dans ma mémoire la maman qui se réjouit et se préoccupe de ses enfants, de ses petits-enfants, de ses arrière-petits-enfants ainsi que tous ceux que, comme moi, elle a « adopté » et entouré d’amour au cours de sa longue et belle vie.

La fête de famille a eu lieu le lendemain des funérailles de Eva chez Michel Babin. Nous étions une quinzaine : des frères et sœurs, des cousins et cousines, un beau-frère, des amis, des enfants et des petit-enfants et même deux chiens du voisinage rassemblés pour fêter. Les conversations autour d’un verre de bière ou de vin, le rire et les jeux des petits enfants, le repas simple mais délicieux, la joie de se retrouver et d’être ensemble pour quelques heures… tous étaient au rendez-vous. Après cette fête, je me suis demandé : si Pierre et Eva étaient les « cœurs battants » qui rassemblaient les gens, quel était celui qui nous rassemblait chez Michel. Celui d’Hélène, la sœur de Diane et l’épouse de Michel, décédée depuis plus de vingt ans? Celui de Rolande, la mère de Diane décédé en 1975? Sans doute les deux.

Ce dont je suis certain c’est que le « cœur battant » qui nous rassemblait dans toutes ces célébrations était bel et bien vivant parce qu’il était celui d’un amour qui ne peut pas mourir. Je reverrai un jour Pierre, Eva, Rolande et Hélène et nous pourrons alors à nouveau célébrer cet amour.

Tuesday, 21 March 2023

Le cadeau et l'emballage

Depuis quelque temps, j’apporte la communion à une amie qui, à cause de sa santé, ne peut plus se déplacer pour aller à l’église. Dimanche dernier, le 19 mars, je suis allé la voir comme d’habitude.  Elle m’a confié que la douleur avec laquelle elle vit de façon constante depuis des années était beaucoup plus intense que d’habitude ce matin-là.

Je la connais bien et je sais qu’elle a une grande dévotion pour Saint Joseph depuis son enfance. Après lui avoir donné la communion j’ai donc adressé ma prière pour elle à son saint patron, « Saint Joseph, tu sais que M. t’aime bien et qu’elle est ta fille. Elle a besoin de toi aujourd’hui. Je sais qu’il est d’usage d’offrir des cadeaux aux personnes que l’on fête. Mais je te demande de faire autrement aujourd’hui. Fais un cadeau à M. et prend soin d’elle. »

Un peu plus tard, M. m’a dit qu’elle avait un rendez-vous à l’hôpital ce jour-là pour des tests et qu’elle avait l’intention de s’y rendre seule dans sa voiture. Inquiet pour elle à cause de sa fragilité, je lui ai offert d’être son chauffeur. Elle a accepté en disant, « Comme ça c’est toi le cadeau que Saint Joseph me fait aujourd’hui? »

En réfléchissant à ceci par la suite, j’ai compris que ma prière à Saint Joseph avait été répondu non pas seulement très rapidement, comme je l’avais d’abord pensé, mais même avant que je la fasse : ma visite chez elle était déjà réponse à cette prière. C’est comme si Saint Joseph me disait, avec un sourire un peu taquin, « Ne vois-tu pas que ta prière est déjà répondu puisque tu es ici avec M? »

Plus tard, en creusant davantage dans cet événement, j’en ai conclu une chose de plus. Le cadeau que Saint Joseph faisait à M. n’était pas uniquement ma présence et ma disponibilité à l’accompagner à son rendez-vous. Je n’étais pas le cadeau lui-même; j’étais simplement l’emballage du cadeau. Le véritable cadeau était la tendresse et la compassion du Seigneur qui se manifestait dans le petit service que je pouvais offrir à M. et dans l’intercession de Saint Joseph.

Le cadeau que Dieu nous offre est quelquefois enveloppés d’un vieux sac en papier et d’un bout de ficelle : dans ce cas-ci, c’était le service rendu qui servait d'emballage. Ce cadeau peut aussi être déposé dans un magnifique coffret incrusté de pierres précieuses : dimanche, ce coffret était la sollicitude de Saint Joseph et son intercession. Toutefois, ce qui compte infiniment plus que l'emballage, c’est le cadeau lui-même : c’est Dieu qui déverse ainsi son Amour et s’offre lui-même en cadeau.

Saturday, 11 February 2023

Un festin royal

Quand mes deux filles étaient toutes petites, elles aimaient cueillir des fleurs sauvages pour les offrir à leur mère. J’ai mémoire de les voir entrer dans la cuisine de l’ancien presbytère de Papineauville où nous demeurions à l’époque avec un énorme sourire et une poignée de pissenlits et de petites fleurs des champs. Les tiges de celles-ci étaient déjà courbées et les pétales fanés. Ces bouquets qui fourmillaient sans doute de bibittes étaient bien pauvres, mais Diane les accueillait comme si c’était le plus beau cadeau qu’elle avait reçu de toute sa vie. Elle sortait le vase en cristal hériter de sa mère, y versait un peu d’eau, et y insérait les fleurs comme elle le faisait pour les roses que je lui offrais occasionnellement. Le bouquet prenait ensuite une place d’honneur au centre de la table de cuisine qui était aussi le centre de notre vie de famille. La vieille table de métal était alors prête pour célébrer le festin: celui de l’amour qui régnait dans notre petite famille.

Saturday, 21 January 2023

Love Forever

 When Marie-Claude was three years old, we lived in the rectory of the church in Papineauville Québec, a sleepy little village about an hour from Ottawa. It was a huge house that had once lodged several priests and servants. The priests no longer lived there and the parish office was in a small section of the building. We rented the remainder of the house.

There was a door that connected the parish office to our living quarters. This door was never locked, and Marie-Claude would often go visit Sister Lise who was the administrator of the Parish and have a chat with her.

Early one morning, Sister Lise came to us and said,  

“Do you know what Marie-Claude just said to me? She told me that God loves us forever.”

Sister then asked MC how she knew that, and she answered:  

‘Mom and dad love each other, and that’s forever.”

I wasn’t there to witness this conversation, but I have always pictured my daughter saying that with great conviction. She started having strong convictions at a very young age!

We were at the dinner table at MC ‘s house a few weeks ago and, as usual, chatting about various things after supper. I don’t know how the conversation turned to marriage, but as it did, Marie-Claude turned to her daughter Katherine and said, with the same conviction she had said it when she was a toddler, “When I married your dad, it was forever. Marriage is forever.”

It is good to know that not only diseases are transmissable. Love is passed on to the next generation as well.

Thursday, 19 January 2023

Considerate People !

Such considerate people! I’m talking about the kind people who send you messages letting you know that your Netflix account (which you do not have) will be closed within 24 hours unless you click on a link they provide and enter your credit card information to prevent this unspeakable tragedy from occurring.

I am so impressed with these good Samaritans who are always on the lookout for your interest and giving their precious time to warn you of similar impending disasters. My admiration for them has reached a point that I even dream of them!

Last night, I dreamed that I received a message on my iPhone letting me know that someone had attempted to hack my bank account. But not to worry, my account was quickly frozen to prevent this from happening. Unfortunately, the message went on, and I would not have access to my money for a week. I obviously panicked for a few seconds. Where would I find the money to buy that five-dollar head of lettuce I needed? But my worries were unfounded. These generous souls offered me a 100$ interest-free loan to help me out. All I needed to do was click on the Web link they provided.

And then I woke up… That is too bad. I would have liked the dream to go on long enough for me to thank these wonderful human beings.

New Memory Bank Needed

My memory has failed me before, many times. I must write all of my appointments down in my agenda and make a to-do
list or else I will easily forget things. I have grown used to the unreliability of my memory. This week, however, something entirely new occurred that has eroded even more my confidence in being able to remember important things.

I had promised to drop off documents at one of the local parishes. One of my friends needed them to make an announcement after the Sunday masses. At the beginning of the week, I went over what I needed to do during the week. I knew I had to deliver those documents. I did remember the task to be done, but as I went digging into the storage system that my brain uses to recall things, my memory brought up an image of my delivering papers to the very church where the delivery was expected. Satisfied I had accomplished my duties, I checked that task off my to-do list.

On the day the documents were needed, my friend called me in a panic and asked me if I had delivered them. She could not find them. I then realized that my memory had pulled a fast one on me: instead of providing me with accurate information on what I had done recently, it pulled up a year-old memory of my delivering pamphlets at the very same church. My memory has betrayed me in a brand-new treasonous way! Does anybody know where I can buy a slightly used but more reliable memory bank?

Monday, 28 November 2022

Préparez le chemin du Seigneur

« Se convertir c’est se détourné de soi-même pour se tourner vers Dieu. » De toutes les définitions de la conversion que j’ai lues, celle-ci est, pour moi, la plus parlante. Elle est de Wilfrid Stinissen, un carme suédois. 

En lisant cette définition, je me suis souvenu d’une réflexion que j’avais écrite il y a quelques années pendant l’Avent. Je vous la partage ici.

 

« Dans le désert, préparez le chemin du Seigneur ; tracez droit, dans les terres arides, une route pour notre Dieu. Que tout ravin soit comblé, toute montagne et toute colline abaissées ! que les escarpements se changent en plaine, et les sommets, en large vallée ! » -- Isaïe 40,3

Les montagnes, les ravins et les chemins tortueux dans ma vie, je les construis depuis presque 70 ans. Mes montagnes sont devenues très hautes, mes ravins très creux et mes chemins vraiment croches !  Je suis parfois douloureusement conscient de ces obstacles à la venue du Seigneur en moi. Toutefois, je parcours ce paysage depuis si longtemps qu’il m’est devenu familier. J’en connais tous les recoins et tous les points de repère. Ceux-ci m’aident à me définir, à délimiter mon identité. Je qualifie certains d’entre eux comme étant positifs :  j’ai tels talents, tels connaissances, telles expériences vécues; je peux faire telles choses; j’ai telles relations, tels acquis, tels rôles. Il y en a d’autres que je qualifie de négatifs: j’ai telles faiblesses, telles limites, telles peurs, tels défauts, telles obsessions… Mais tous, les points de repère négatifs comme ceux qui me semblent être positifs, servent à délimiter qui je suis… et qui je ne suis pas. J’ai ainsi déjà fait, souvent inconsciemment, un travail d’arpenteur. Ce qu’Isaïe entrevoie avec son œil de prophète balaierait complètement ce paysage familier et tous ces points de repères. Le travail d’arpentage serait à refaire. 

Les points de références qui délimitent les frontières de mon petit univers ont certainement des avantages. Je sais ce qui est à moi, ce qui m’appartient. Du moins, je crois le savoir. Mais ces frontières ont aussi de sérieux désavantages. Elles sont vulnérables, toujours à affirmer avec vigilance et à défendre avec force si nécessaire. Je constate que quand les événements ou des personnes viennent contester mes frontières, je deviens facilement défensif et même agressif à l’occasion. Il n’y a pas que monsieur Trump qui veut ériger des murs à ses frontières. Je le fais aussi. Des murs qui me permettent de défendre mon identité, mais qui m’enferme sur moi-même et m’isole des autres.

La seule façon de ne plus avoir de frontières qui font obstacles à l’action de l’Esprit est de n’avoir qu’un seul point de repère, un seul centre qui englobe tout et n’exclut donc rien. Il n’y aurait alors plus rien à conquérir pour se créer une identité, plus rien à défendre puisque tout serait déjà et pour toujours inclus dans ce centre. J’ai l’impression qu’il y avait un peu de cela dans la réponse du père au fils ainé dans la parabole de l’enfant prodigue : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. » Le seul centre qui existe qui inclus tout et n’exclus donc rien est Dieu. Il faut que Dieu soit le seul point de repère.

Saint Paul avait parcouru ce chemin de conversion: il avait trouvé son centre en Dieu. C’est ce qui lui permettait de dire, « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » Galates 2,20 

Je crois que « entrer dans le royaume de Dieu » c’est « pénétrer » ou « se laisser pénétrer » par ce centre et là entendre le Père dire, "Tu es mon fils, ma fille bien-aimée en qui je mets toute ma joie."  

Saturday, 1 October 2022

Lac sans fond

Certains souvenirs d’enfance, quand ils remontent à la surface, me parviennent toujours chargés d’une émotion particulière, comme si cette émotion faisait partie intégrale du souvenir. L’expression « lac sans fond » m’est revenue en mémoire récemment et, avec elle, la charge émotive qu’elle générait en moi quand j’étais petit gars : un sentiment intense d’anxiété.

Je ne m’étais jamais arrêté pour réfléchir à pourquoi cette émotion était ainsi collée à l’image que je me faisais d’un lac sans fond. Je crois que c’est lié à des expériences vécues dans mon enfance. À l’âge de quatre ou cinq ans, je me suis retrouvé dans une maison d’accueil avec deux de mes frères plus jeunes que moi. Je ne connaissais pas le couple à qui nous avions été confié. Je ne comprenais pas pourquoi nous étions là, ni pourquoi mes parents et mes grands frères n’étaient pas avec nous. Pour un petit bonhomme de mon âge, c’était comme si les fondements même de mon identité et de ma sécurité avaient soudainement été retirés de sous mes pieds. Je n’aurais évidemment pas pu l’exprimer ainsi à ce moment-là, mais la terre ferme qu’avait été ma famille était disparue et je me retrouvais devant un gouffre. Sans doute que l’image d’un lac sans fond évoquait en moi – et évoque toujours – le sentiment de perdre pied, de ne pas pouvoir trouver d’assise et d’être engouffré dans des profondeurs où même la lumière ne peut plus pénétrer.

J’ai ressenti ce gouffre à d’autres moment de ma vie : après l’infarctus que j’ai subi à l’âge de 39 ans; dans les quelques années qui ont suivi ma retraite de l’enseignement; pendant la maladie de mon frère François…

Avec le passage du temps, je prends de plus en plus conscience du fait que les événements qui m’ébranlent, me font perdre le contrôle et me donnent le vertige pointent vers un abîme qui n’est pas extérieur à moi mais intérieur. Le lac sans fond, c’est moi. Il n’y a pas de fond, pas de limites à mon désir de vivre pleinement, de trouver la joie et la paix, d’aimer et d’être aimé. Les événements externes ne font que me révéler la présence de cet abîme de désir en moi.

Il m’arrive encore aujourd’hui de quelquefois sentir que je perds pied. Toutefois, le sentiment d’anxiété n’est plus l’émotion dominante quand cela m’arrive. Il s’est graduellement opéré en moi un changement de regard sur ces abîmes, petits et grands, qui surgissent occasionnellement dans ma vie et celles des autres autour de moi. Comme le bassin d’un lac existe pour accueillir et retenir l’eau qui viendra le combler, le « sans fond » en moi, le désir sans limite qui m’habite, est là pour accueillir une présence qui, elle aussi est inépuisable et sans limites et qui seule peut combler l'abîme : l’Amour de Dieu.