Monday, 28 November 2022

Préparez le chemin du Seigneur

« Se convertir c’est se détourné de soi-même pour se tourner vers Dieu. » De toutes les définitions de la conversion que j’ai lues, celle-ci est, pour moi, la plus parlante. Elle est de Wilfrid Stinissen, un carme suédois. 

En lisant cette définition, je me suis souvenu d’une réflexion que j’avais écrite il y a quelques années pendant l’Avent. Je vous la partage ici.

 

« Dans le désert, préparez le chemin du Seigneur ; tracez droit, dans les terres arides, une route pour notre Dieu. Que tout ravin soit comblé, toute montagne et toute colline abaissées ! que les escarpements se changent en plaine, et les sommets, en large vallée ! » -- Isaïe 40,3

Les montagnes, les ravins et les chemins tortueux dans ma vie, je les construis depuis presque 70 ans. Mes montagnes sont devenues très hautes, mes ravins très creux et mes chemins vraiment croches !  Je suis parfois douloureusement conscient de ces obstacles à la venue du Seigneur en moi. Toutefois, je parcours ce paysage depuis si longtemps qu’il m’est devenu familier. J’en connais tous les recoins et tous les points de repère. Ceux-ci m’aident à me définir, à délimiter mon identité. Je qualifie certains d’entre eux comme étant positifs :  j’ai tels talents, tels connaissances, telles expériences vécues; je peux faire telles choses; j’ai telles relations, tels acquis, tels rôles. Il y en a d’autres que je qualifie de négatifs: j’ai telles faiblesses, telles limites, telles peurs, tels défauts, telles obsessions… Mais tous, les points de repère négatifs comme ceux qui me semblent être positifs, servent à délimiter qui je suis… et qui je ne suis pas. J’ai ainsi déjà fait, souvent inconsciemment, un travail d’arpenteur. Ce qu’Isaïe entrevoie avec son œil de prophète balaierait complètement ce paysage familier et tous ces points de repères. Le travail d’arpentage serait à refaire. 

Les points de références qui délimitent les frontières de mon petit univers ont certainement des avantages. Je sais ce qui est à moi, ce qui m’appartient. Du moins, je crois le savoir. Mais ces frontières ont aussi de sérieux désavantages. Elles sont vulnérables, toujours à affirmer avec vigilance et à défendre avec force si nécessaire. Je constate que quand les événements ou des personnes viennent contester mes frontières, je deviens facilement défensif et même agressif à l’occasion. Il n’y a pas que monsieur Trump qui veut ériger des murs à ses frontières. Je le fais aussi. Des murs qui me permettent de défendre mon identité, mais qui m’enferme sur moi-même et m’isole des autres.

La seule façon de ne plus avoir de frontières qui font obstacles à l’action de l’Esprit est de n’avoir qu’un seul point de repère, un seul centre qui englobe tout et n’exclut donc rien. Il n’y aurait alors plus rien à conquérir pour se créer une identité, plus rien à défendre puisque tout serait déjà et pour toujours inclus dans ce centre. J’ai l’impression qu’il y avait un peu de cela dans la réponse du père au fils ainé dans la parabole de l’enfant prodigue : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. » Le seul centre qui existe qui inclus tout et n’exclus donc rien est Dieu. Il faut que Dieu soit le seul point de repère.

Saint Paul avait parcouru ce chemin de conversion: il avait trouvé son centre en Dieu. C’est ce qui lui permettait de dire, « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » Galates 2,20 

Je crois que « entrer dans le royaume de Dieu » c’est « pénétrer » ou « se laisser pénétrer » par ce centre et là entendre le Père dire, "Tu es mon fils, ma fille bien-aimée en qui je mets toute ma joie."  

Saturday, 1 October 2022

Lac sans fond

Certains souvenirs d’enfance, quand ils remontent à la surface, me parviennent toujours chargés d’une émotion particulière, comme si cette émotion faisait partie intégrale du souvenir. L’expression « lac sans fond » m’est revenue en mémoire récemment et, avec elle, la charge émotive qu’elle générait en moi quand j’étais petit gars : un sentiment intense d’anxiété.

Je ne m’étais jamais arrêté pour réfléchir à pourquoi cette émotion était ainsi collée à l’image que je me faisais d’un lac sans fond. Je crois que c’est lié à des expériences vécues dans mon enfance. À l’âge de quatre ou cinq ans, je me suis retrouvé dans une maison d’accueil avec deux de mes frères plus jeunes que moi. Je ne connaissais pas le couple à qui nous avions été confié. Je ne comprenais pas pourquoi nous étions là, ni pourquoi mes parents et mes grands frères n’étaient pas avec nous. Pour un petit bonhomme de mon âge, c’était comme si les fondements même de mon identité et de ma sécurité avaient soudainement été retirés de sous mes pieds. Je n’aurais évidemment pas pu l’exprimer ainsi à ce moment-là, mais la terre ferme qu’avait été ma famille était disparue et je me retrouvais devant un gouffre. Sans doute que l’image d’un lac sans fond évoquait en moi – et évoque toujours – le sentiment de perdre pied, de ne pas pouvoir trouver d’assise et d’être engouffré dans des profondeurs où même la lumière ne peut plus pénétrer.

J’ai ressenti ce gouffre à d’autres moment de ma vie : après l’infarctus que j’ai subi à l’âge de 39 ans; dans les quelques années qui ont suivi ma retraite de l’enseignement; pendant la maladie de mon frère François…

Avec le passage du temps, je prends de plus en plus conscience du fait que les événements qui m’ébranlent, me font perdre le contrôle et me donnent le vertige pointent vers un abîme qui n’est pas extérieur à moi mais intérieur. Le lac sans fond, c’est moi. Il n’y a pas de fond, pas de limites à mon désir de vivre pleinement, de trouver la joie et la paix, d’aimer et d’être aimé. Les événements externes ne font que me révéler la présence de cet abîme de désir en moi.

Il m’arrive encore aujourd’hui de quelquefois sentir que je perds pied. Toutefois, le sentiment d’anxiété n’est plus l’émotion dominante quand cela m’arrive. Il s’est graduellement opéré en moi un changement de regard sur ces abîmes, petits et grands, qui surgissent occasionnellement dans ma vie et celles des autres autour de moi. Comme le bassin d’un lac existe pour accueillir et retenir l’eau qui viendra le combler, le « sans fond » en moi, le désir sans limite qui m’habite, est là pour accueillir une présence qui, elle aussi est inépuisable et sans limites et qui seule peut combler l'abîme : l’Amour de Dieu. 

Monday, 26 September 2022

Perdu ou donné?

Occasionnellement, je me rends à un rendez-vous et la personne que je devais rencontrer a eu un empêchement ou a tout simplement oublié et n’est pas disponible ou absente. Pour plusieurs, des occasions comme celle-là sont frustrantes. J’ai souvent entendu des personnes dire dans ces situations-là, « J’ai perdu mon temps. »  

En toute honnêteté, ce n’est jamais ma réaction. Quand je rends visite à quelqu’un ou que je me déplace pour une rencontre, j’ai déjà pris la décision de donner mon temps à cette personne ou à l’objectif de la rencontre. Si la personne n’est pas là ou pas disponible, ou encore si la rencontre est annulée je ne perds rien. Je ne peux pas perdre ce qui ne m’appartient plus – le temps déjà donné. Au contraire, je reçois en cadeau du temps dont je ne comptais plus disposer. Quelle bénédiction!

Sunday, 28 August 2022

Caring for Others

Something I read in the Globe and Mail this morning deeply saddened me. I know that people are tired of hearing and reading about the pandemic and what I am about to jot down is not what most people want to hear. I am writing this more for myself than for others. When something troubles me deeply, I feel the need to express my feelings in words. It is, in a way, a form of exorcism.

In an article entitled How much death, illness and disruption from COVID-19 infections are we willing to live with? the reporter states:

“Historically, society has considered the level of illness and death from a disease to be acceptable when those illnesses and deaths primarily affect the least advantaged, Dr. Smith said. When a disease is suppressed to a point where average members of the public no longer feel their lives are endangered, they tend to stop caring about it, even if it still threatens those who are vulnerable, he said.”  https://www.theglobeandmail.com/canada/article-how-much-death-illness-and-disruption-from-covid-19-infections-are-we/

What saddens me in this is not the fact that people have stopped caring about Covid-19. It is the question that it raises and is also implied in the last sentence: have people stopped caring about the most vulnerable? I know this is not something deliberate and calculated. We don't wake up one morning and tell ourselves, "Today, I will no longer care about others. Only myself." But there is a danger of doing that unconsciously.

I still wear a mask when I am in a setting where I can come in close contact with others. I do so because I know I am no longer young, and I am therefore among the “vulnerable”.  That, however, is not the only reason I do so. I know there are others around me and that I need to protect them as well, whether they be family members or strangers. After two and a half years of doing so, I am tired to the bones of wearing masks and being careful, but I have not yet grown tired of caring for others. I hope I never will.

Saturday, 27 August 2022

The Back-to-School Syndrome

Schools are about to open. I know that not only because we are at the end of August, but also because I am having my usual “back-to-school dreams”. These dreams (usually nightmares) start occurring a few weeks before the start of the school year.

In the past, these followed the same basic pattern: I arrive at school on the first day totally unprepared, I don’t know what I am teaching nor where my classroom is and I don’t even have my teaching schedule. Once I finally find the classroom, I realize I don’t have the student list and can’t take attendance. Total chaos! Kafka could not do a better job of creating such a nightmarish scenario. When I wake up, it takes me a few minutes to calm down by repeating to myself, “This is just a dream. It did not happen. You are no longer a teacher.”

This year, the pattern of some of the dreams has changed somewhat. I had one nightmare in which the school was an old, dilapidated castle with large rooms that served as classrooms. When I arrived, I saw that they were not furnished with the usual school furniture. I had to scrounge up sofas and armchairs and whatever other items I could find to furnish my classroom which must have been an old dungeon because it was dark, damp, and musty.

Other retired teachers have told me that they also have similar recurrent dreams. I enjoyed teaching very much and am grateful I was given the opportunity to do so, but it can be a very stressful profession at times.

One dream I had this week completely broke from the usual pattern and was not a nightmare at all even though it did involve the back-to-school theme. I was not the principal character in this dream. My daughter Geneviève was. She was going back to study at the University of Ottawa and, on her first day there, they elected her president of the student council. It was nice to feel something else than panic in a back-to-school dream. I woke up feeling very proud of my daughter. I smiled when I saw that even in my dreams, I am proud of my daughters. 

Thursday, 25 August 2022

Le cadeau de Dieu

Le cadeau que Dieu m’a fait n’est pas celui de ne jamais trébucher et tomber, mais celui de toujours pouvoir me relever et retrouver l’équilibre qui me permet de continuer à marcher. Il n’a pas empêché mes déroutes, mais a sans cesse dirigé mes pas pour que je retrouve le chemin. Il n’a pas enlevé ma faiblesse mais il m'a offert son bras comme appuie pour que je puisse prendre de plus en plus conscience de sa présence à mes côtés. Heureuse faiblesse, heureuse pauvreté, heureuse faute qui m’a valu un tel rédempteur.


Monday, 8 August 2022

Exotic Fare

Because it is close to many embassies, our neighbourhood grocery store serves people from a variety of cultures and with culinary tastes in a wide spectrum of ethnic cuisines. The staff at the store is therefore accustomed to requests that are a bit out of the ordinary and they attempt to stock products that one would not usually find in other grocery stores.

A few years ago, I was shopping at that grocery store and could not find the perogies I was looking for. I, therefore, approached one of the employees, a very amiable chap who always greeted me with a smile and asked him where I could find them. I spoke to him in French pronouncing perogies while the appropriate rolling of the “r” and omitting the “s” at the end. The smile on his face disappeared and was quickly replaced by a look of consternation and disbelief. After a few seconds, he regained his composure and responded, “I don’t think we have any, but the chicken is over there.”

That rather strange response to my query surprised me at first until it dawned on me that he had understood “parakeet’ rather than “perogies”.

Monday, 1 August 2022

Destiny

I believe my grandson Victor is unwittingly getting ready to become a great tragic historical figure.

Kent, his father, was telling me yesterday that Victor asked him, “Do you love me more than anybody else?” His dad answered, “I love everyone in our family.”  Not satisfied, Victor insisted, “Yes, but do you love me the most?” Kent, “What would you do if I told you no?” Victor, dramatically, “Then I would run away from home!” Dad, “But what would you do if you ran away from home? Where would you go?” Victor, assuming a theatrical posture worthy of a Shakespearian character, “I would follow my destiny!”

I can just imagine picking up his autobiography in 80 years (I expect to live a long life) and reading these words,

At the age of eight, feeling the sting of having received too little love, I packed my suitcase with essentials: a Batman cape, a pair of relatively clean socks, and a handful of superhero figurines. As I crossed the threshold of our family home, never to return, I glanced at my family standing there in tears and said, “I must follow my destiny!”  

Sunday, 17 July 2022

Photo de famille

Une photo de famille (circa 1955?) que je n’avais jamais vue auparavant. C’est la seule photo que j’aie vue contenant tous les membres de notre famille et une des rares en couleur de cette époque. Je ne sais pas où elle aurait été prise ni par qui. Le paysage champêtre suggère que c’était peut-être chez une de mes tantes qui avait une ferme (tante Rose?). Je n’ai aucun souvenir de la journée de la prise de cette photographie.

Diane la regardait hier et me disait qu’elle ne reconnaissait pas les garçons, même pas moi. Je n’ai pas eu de difficulté à les placer tous. Ils sont en ordre d’âge du plus jeune au plus âgé de gauche à droite : Michel, François, Denis, Gilles, Pierre, Jean-Guy et Roger. Ce n’a pas dû être facile de nous rassembler ainsi et de nous mettre en ordre de cette façon-là. Les visages de Pierre et de Jean-Guy en disent long : une expression de révolte et de colère qu’on ait interrompu leurs jeux pour cette prise de photo? C’est certainement possible!

Mes cheveux presque blonds et ceux de Denis qui l’étaient encore plus que les miens, m’étonnent. J’avais aussi oublié que je portais des verres quand j’avais cet âge-là – une tentative de renforcir un œil « paresseux » qui n’a jamais fonctionné. Mon œil gauche qui était atteint de strabisme avait été corrigée par une intervention chirurgicale, mais est toujours demeuré plus faible que l’autre et a toujours été un peu vagabond – Il a tendance à regarder à droite quand l’autre fixe quelque chose à gauche. La grandeur de Roger m’étonne aussi. Il est mon ainé de dix ans. Il devait donc avoir 16 ans à ce moment-là.

Le sourire de mes parents me surprend un peu. Pourtant, dans la plupart des photos prisent d’eux, ce sourire était là. Le souvenir que j’ai d’eux diffère de cela. J’imagine qu’avec une marmaille comme la nôtre à nourrir et à tenir en vie ce n’était pas toujours facile pour eux. Mon gendre Kent, en parlant de mon petit-fils Victor, dit souvent qu’il a un « désir d’extinction » parce qu’il fonce à toute allure sans se soucier des murs qui pourraient se trouver sur sa route. Cela est certainement un héritage de la famille Côté : nous avons contribué amplement à enrichir les compagnies de diachylons et aidé les médecins de famille et de salle d’urgence à se tenir occuper. J’ai souvenir de nombreuses visites chez le médecin et de plusieurs séjours à l’hôpital. Mes frères ont sans doute aussi de nombreux souvenirs semblables.

Cette photo me laisse avec un mélange de sentiments: nostalgie d’une époque révolue mais qui habite toujours une partie de qui je suis; sentiment de gratitude pour toute la vie et la croissance qu’une grande famille m’a permis d’éprouver; un peu de tristesse en pensant que nous étions neuf à l’époque et que quatre sont maintenant parties.

C'est une belle photo et un beau cadeau à découvrir 67 ans plus tard!

Thursday, 14 July 2022

Elevators: The Birthplace of Urban Legends

Our unit is on the 15th floor. The elevator takes approximately 35 seconds to and from the second basement where my car is parked. When I am lucky enough to have a fellow passenger on the elevator, I  have up to half a minute to engage in a conversation with them. I enjoy doing that. It is my way of acknowledging their presence. Often, the conversation will bear on something as superficial as the weather. The topic does not matter. Sometimes, I will be more direct and ask, even a stranger, “How is life treating you?” Occasionally, not often granted, they will unburden themselves by sharing something personal and they will exit the elevator a little more light-hearted than when they got on. At least I like to think so.

Yesterday, my co-traveler on the short trip to the underground garage was a young woman, a new arrival in the building I had never seen before. She initiated the conversation and commented on how wonderful the weather was. I agreed, “It is indeed. I ordered the weather we are getting today.” She accepted to play along with my little game and asked me, “How do you do that? I would love to order a beautiful day for tomorrow?” Naturally, I felt obliged to share my recipe for conjuring up a sunny day and responded, “That’s easy. You dance three times around a mulberry bush singing: sunshine, sunshine!” The elevator door then opened, and my young friend exited laughing but saying that she would try that.

Today, the sky is covered, it is raining, and the air is muggy. The only possible conclusion is that the young lady did not dance around a mulberry bush. She may not have been able to find one. Or maybe, she did not know what type of dance would be appropriate (I surmise the flamenco works best, but any style would do), or she may not have known what tune to use (I suspect something upbeat would be more efficient). Whatever the reason, I am disappointed she did not perform the prescribed ritual. I would have enjoyed another sunny day.

Sunday, 26 June 2022

Abandon

Il y a toute la différence du monde entre « abandonner » et « s’abandonner ».

Quand j’abandonne, je m’admets tout simplement incapable d’atteindre le but, quel qu’il soit. Le point de mire est mon ego, ma capacité d’accomplir, ma volonté de réussir. Quand j’abandonne, je m’admets vaincu, je me reconnais « rendu au bout de mon rouleau ». Je suis alors le lutteur qui sort de l’arène tête baissée et humilié. Abandonner m’isole, me plonge dans une solitude que je n’ai pas choisie et qui m’écrase. L’abandon a un goût de finalité, un goût de mort.

Quand je m’abandonne, j’entre dans une réalité tout autre. Je ne suis plus centré sur moi-même. M’abandonner implique que je me remets entre les mains d’un autre que moi-même, qu’il y a un vis-à-vis en qui j’ai confiance. Ce genre d’abandon n’est pas une admission de faiblesse, ni une perte de moi-même. C’est reconnaitre que je ne suis pas seul à porter mon fardeau. C’est croire que, quand je consens à déposer ma vie, je ne la perds pas mais qu’il y a quelqu’un pour l’accueillir comme un don précieux. M’abandonner est le geste le plus libre que je puisse poser. C’est ce qui m’ouvre un passage vers une vie en plénitude.  

« Entre tes mains je remets mon esprit. » Luc 23,46

Sunday, 19 June 2022

"Hélicoptère" - Les mots de mon enfance

Quand je tombe sur un mot que je ne reconnais pas, je cherche la définition sur internet. Ce matin, c’est en lisant un article de journal que j’ai trouvé le mot « samare ». Une recherche rapide sur Google et voici que m’est apparue une image familière de mon enfance, ce que nous appelions un « hélicoptère » parce qu’elle tournoyait comme une hélice quand elle tombait des érables ou des ormes qui peuplaient la forêt du parc de la Gatineau ou nous passions beaucoup de temps.

Un mélange d’étonnement et d’émerveillement est monté en moi en voyant des photos de samares : étonnement de n’avoir jamais connu le terme technique de ces objets pourtant si familiers quand j’étais petit et souvenir de l’émerveillement qu’ils provoquaient toujours en moi en les voyant descendre et atterrir à mes pieds quand j’étais petit gars.

J’aime ce mot samare. Il a sur mes lèvres, quand je le prononce, un goût de silence, celui de la brise légère qui lui permet de s’envoler à l’aventure lorsqu’elle quitte l’arbre en quête d’une vie nouvelle.  

Wednesday, 15 June 2022

A Time to Seek and a Time to Wait

Our thirst for meaning is a very powerful force, but it is double-edged. It compels us to keep seeking what we hope will fulfill our deepest yearnings even when faced with obstacles. It can, however, become the very obstacle that prevents us from reaching that goal.

A man looking for meaning is like someone driven by thirst who digs deeper and deeper to find the source that he hopes is hidden below. He exerts himself and displaces large amounts of rocks, roots, and soil in the process. The mound – a veritable mountain – he creates in doing so is testimony to the strength of his desire for water.

But what if he is digging in the wrong place, and the mountain he creates covers the very spot where the source was buried just below the surface, soon to surge forth…

Sometimes it is best to seek by being still and waiting for the source to reveal itself to us.

Sunday, 5 June 2022

Prières pour Élise et André

Déjà presque six mois que Élise et André sont partis. Je pense à eux souvent. Voici les intentions de prères que j'ai écrites pour eux et lues lors des funérailles.

Si notre cœur est rempli de tristesse à cause de la perte d’André et d’Élise, il est aussi plein de gratitude pour tout ce qu’ils nous ont laissé en héritage.

Pour tout l’amour qu’ils ont partagé ensemble et avec lesquels ils ont enveloppé leurs enfants, leurs petits-enfants, tous les membres de leur famille et leurs nombreux amis, nous te disons merci Seigneur et nous te prions :

Fais grandir en nous cet héritage d’amour qu’Élise et André nous ont laissé.

Pour tous les liens d’amitié qu’ils ont sus tisser, pour la joie qu’ils savaient semer, pour les rires et les sourires si souvent offerts, pour les peines qu’ils ont sues consoler, nous te disons merci Seigneur et nous te prions :

Fais grandir en nous cet héritage d’amitié qu’Élise et André nous ont laissé.

Pour leur accueil chaleureux, pour leur porte toujours débarrée et leur cœur toujours ouvert pour accueillir ceux qui croisaient leur vie – les voisins, les mal-aimés, les laisser pour compte, les réfugiés, les poqués de toutes sortes, nous te disons merci Seigneur et nous te prions :

Fais grandir en nous cet héritage d’accueil qu’Élise et André nous ont laissé.

Pour la grande générosité avec laquelle ils se sont toujours donnés, pour les heures passées à servir les autres, pour le don de leurs talents, de leur tendresse et de leur bonté avec lesquels ils ont comblé leur famille, leur paroisse et leur communauté, nous te disons merci Seigneur et nous te prions :

Fais grandir en nous cet héritage de générosité qu’Élise et André nous ont laissé.

Oui, merci Seigneur de nous avoir offert le cadeau d’André et d’Élise pendant tant d’années. Nous te demandons maintenant de les bénir et de les faire entrer dans l’héritage que tu as préparé pour eux. Accueille-les comme ils ont su nous accueillir, enveloppe-les de ton amour et de ta tendresse comme ils ont su le faire pour nous, donne-leur ta paix et ta joie comme ils ont su la donner à tant de monde.

Fais aussi grandir dans le cœur des membres de leurs familles et de tous les membres de notre communauté paroissiale l’espérance de les retrouver un jour et d’être avec eux dans ton Royaume pour l’éternité.

Monday, 30 May 2022

Why would he take me back in?

“If I were in his shoes, I would wonder why he would take me back in.” That was the comment a friend of mine made the other day during a recent conversation I had with him about the prodigal son in the parable. What a wonderfully meaningful question to ask! Why indeed would the father welcome that ungrateful son after all the pain he had inflicted upon him? It certainly could not be because the son wished to amend his ways, repair and renew his relationship with his father, and become the loving son the father had always hoped he would be. He was simply looking for three square meals a day. Not exactly the picture of perfect repentance and solid ground for a change of direction in his relationship with the father! It certainly was not either because of a stellar plea for mercy or a convincing defense prepared and expertly delivered. His father did not even let him finish his rather lackluster attempt at doing that. Nor was it because the young lad had redeeming qualities or the ability to charm his way out of tough situations. The young man who sheepishly approached the father was a picture of weakness, dejection, and failure.

I told my friend that his question would make a great prayer. Afterward though, upon reflection, I thought it would have to be modified slightly for that to be the case. It would have to be addressed directly to the Father rather than be a musing that is turned in on oneself. Rather than wondering, “Why in the world would the Father take me back in?” I would have to phrase the question thus, “Father, why would you take me back in?” Such a question would turn me away from myself toward God and open me up to listen to His answer deep within.  I have no doubt that it would soon come and sound something like this:

“This is what real love is: It is not our love for God; it is God’s love for us. He sent his Son to die in our place to take away our sins.” 1 John 4,10 

Tuesday, 17 May 2022

Au pied de la croix

 

Je sens le désir aujourd’hui de m’installer au pied de deux croix, celle de Jésus au calvaire et celle de toutes les personnes qui souffrent. Je voudrais m’installer là pour écouter la voix de Jésus et celle de ces personnes qui portent un lourd fardeau.

C’est la même voix, l’une dans l’autre.

Je veux accueillir ces voix et les laisser me pénétrer profondément, si profondément qu’elles éveillent en moi une prière, un geste de tendresse, un regard de compassion, un accueil inconditionnel pour toutes ces personnes que le Seigneur met sur ma route.

Je veux écouter si profondément que j’entendrai aussi la voix de ceux qui n’ont pas de voix ou qui n’ont personne pour accueillir leur souffrance et la présenter au Seigneur.

Toi maman Marie, installe-toi avec moi au pied de ces deux croix pour m’apprendre à écouter la voix de ton fils Jésus et celle de mes sœurs et de mes frères.

C’est la même voix, l’une dans l’autre. C’est la même croix, l’une dans l’autre.

Gilles

Thursday, 12 May 2022

A Deep Peaceful Sleep

Thank you to all those who expressed their condolences to my family and me. Your thoughts, prayers and expressions of affection are greatly appreciated!

I remember something that happened three years ago. François’ illness had progressed so much that he no longer communicated verbally and that weighed heavily on me. Once, I told him, “I wish you could tell me what is happening in your mind, François. I wish I could understand what you are feeling.” He said nothing then, but several weeks later, he looked at me, and his eyes told me that he had somehow broken through the haze of dementia for a few seconds and he told me, “You know what I really want? I wish I could sleep a deep peaceful sleep.” Those were the very last words he spoke to me. I am convinced François is at peace right now. I believe his last expressed wish was fulfilled. I felt that very strongly when I sat by his bedside after he passed away last week.

Two days later, that feeling was strengthened by a little incidence. There was a pigeon on our balcony. It was a very light beige, and, at a distance, it looked almost as white as a dove. Diane tried to shoo it away, but it seemed unable to fly. I assumed that it was hurt, and I called the Ottawa Valley Wild Bird Care Center to find out what I should do. They said it might simply be a very young pigeon who was not yet used to flying and suggested I wait a few hours before bringing it to them. In the afternoon, it was gone. It had learned how to use its wings.

The next morning, Rita, François wife, emailed me the English text of François’ obituary and asked me to translate it into French so that it could appear in the local French newspaper. The last sentence in the text read, “Memorial donations to the charity of your choice, including to the Ottawa Valley Wild Bird Care Center, would be appreciated.” I thought, “François sent me a peace dove to let me know that he was indeed now sleeping a “deep peaceful sleep. He has found his wings.” Rest in peace little brother.

Saturday, 16 April 2022

Happiness

 My daughter Geneviève posted the photo below on the Instagram site. She added a comment and a question under it: “Creating makes me happy. What makes you happy? »

I hope she will forgive my sharing both here. I wanted to answer her question.
What makes me the happiest is seeing how beautiful my children and grandchildren have become. I recognize Geneviève in the greeting card she created. It is a very good likeness of how I perceive her: unity in complexity, all-encompassing gentleness, and that wonderful gift she has developed that enables her to gather the most heterogeneous bunch of people and make a family out of them by simply loving them.



Sunday, 20 March 2022

Rencontrer l'autre en vérité

Quand je rends visite à une personne malade j’y vais avec ce que je suis et ce que je vis. Je ne suis pas parfait et, il va de soi que ma rencontre de l’autre ne le sera pas non plus. Je ne suis jamais aussi désintéressé que j’aimerais l’être, aussi vidé de moi-même qu’il faudrait l’être, aussi disponible à l’accueil de l’autre que je voudrais l’être. Il est difficile pour moi de me rendre au rendez-vous en laissant derrière toutes mes attentes, mes façons de percevoir, mes peurs, mes malaises et mes inquiétudes. Je fournis un effort conscient pour laisser cela derrière avant d’entrer dans la demeure de la personne que je visite, mais un peu de tout cela reste quand même coller à ma peau malgré tout.

Les sentiments qui montent souvent à la surface au moment même où j’essaie de tendre l’oreille à la personne qui se confie à moi sont témoins de mes difficultés à être complètement présent et à ne jamais céder à la tentation d’évaluer, de juger ou d’enfermer l’autre dans mes schèmes de référence.

Je suis très conscient de ces failles et de ces limites. Celles-ci ne sont pourtant pas sources de découragement. Elles m’invitent au contraire à me tourner vers le Seigneur et à le prier de venir lui-même rencontrer, accueillir, écouter et aimer la personne que je visite, « Prend mes yeux, mes oreilles, ma bouche et tout ce que je suis. En moi, Seigneur, vas toi-même à la rencontre de cette personne. »

Plus j’apprends à faire cela, plus ce qui est limite et imperfection en moi cède la place à l’Amour parfait et sans faille du Christ et c’est lui qui comble la distance qui autrement pourrait empêcher une véritable rencontre avec l’autre.

Comme les cinq petits pains et les deux poissons étaient nettement insuffisant pour nourrir la foule immense qui avait faim sur le bord du lac de Tibériade, ce que j’ai à offrir aux autres sera toujours insuffisant s’il n’est pas d’abord offert à Jésus. 

Si je rencontre une personne qui a besoin de présence, d’écoute et de compassion et que j’essaie de combler son besoin en ne m’appuyant que sur mes propres ressources, je la prive de l’essentiel. Il n’y a que Dieu qui peut combler le coeur d’une personne. Oui, le Seigneur me demande de donner ce que j’ai et ce que je suis à l’autre dans la rencontre que je fais avec elle, mais pour que ce don soit suffisant il faut d’abord que je dépose ma vie entre les mains de Jésus, que je la lui donne pour qu’elle soit uni à la sienne. 


Friday, 18 March 2022

Chocolate Covered Brocoli

My daughter and grandchildren came for lunch Wednesday. A plate of fresh cut vegetable with a humus dip to start off. Then we had hot dogs with a coleslaw and smokies with sauerkraut. Victor had his main staple: a slice of white bread with peanut butter. 

Desert is not usually on the menu for lunch when the kids are home so I had to tell them I could not give them desert, but I did have broccoli for them – chocolate covered broccoli. I took out the Ah Caramel box and gave each of them a portion. The broccoli, I told them, was inside. Anything containing broccoli is certainly not desert. 

Lo and behold, when we bit into the chocolate covered squares, we found that someone had mischievously removed all the broccoli and replaced it with caramel instead! Obviously, we had to finish eating them – waste not want not. So, in spite of my best intentions, my grandchildren had desert with their lunch. I will have to have a serious talk with my grocer about the missing broccoli.

Saturday, 12 March 2022

Goûter la paix comme un enfant

Quand j’étais enfant et que je vivais à quelques pas de ce qui est maintenant la promenade de la Gatineau, mes frères et moi passions des journées entières à « courir les bois.» La forêt et les champs étaient notre grand terrain de jeux. Au lieu de structures en bois ou en métal, les falaises et les pentes étaient les charpentes qui se prêtaient à nos jeux d’escalade et à nos glissades. Les rivières et les ruisseaux nous servaient de piscines et d’abreuvoirs. Les fraises, les mûres, les groseilles, les framboises et les bleuets sauvages étaient nos petites collations en attendant les repas que nous prenions en vitesse à la maison parce que nous étions pressés de retourner jouer dehors.

Récemment, je pensais à ces ruisseaux de mon enfance, ces eaux limpides étincelantes de rayons de soleil qui coulaient à toute allure entre les failles des rochers et des ravins. J’aimais surtout ces bassins qui se formaient le long de leur parcours, ces creux où l’eau se déversait, ralentissait sa course avant de poursuivre son trajet un peu plus loin. Ces bassins étaient grouillants de vie. Des têtards, des grenouilles des ménés, des écrevisses, et des libellules les peuplaient et nous remplissaient de joie et d’émerveillement.

La prière est pour moi comme ces bassins de mon enfance : un petit creux que je m’accorde, souvent de nuit, pour accueillir comme une eau fraiche l’amour du Dieu qui se déverse en moi. Ces temps de silence sont, eux aussi, plein de vie, de joie et d’émerveillement. Là, je laisse le courant de ma vie ralentir quelques instants pour goûter à la paix d’un enfant. 

Saturday, 19 February 2022

Ambitionner sur le pain béni

Je suis assez « ancien » pour avoir en mémoire un souvenir du temps où l’on distribuait du « pain béni » aux enfants qui n’étaient pas en âge de communier. Je me vois, petit bonhomme de cinq ou six ans, à la sortie de l’église ou un homme se tenait à l’extérieur sur le perron et distribuait des petits pains aux enfants qui défilaient devant lui.

Je me souviens aussi du sentiment d’anticipation avec lequel j’ai tendu la main pour en accueillir un. Occasionnellement, ma mère faisait du bon pain frais dont je raffolais, particulièrement quand il était encore chaud et qu’il faisait fondre le beurre. Mes narines et mes papilles gustatives ont gardé le souvenir de ces jours-là. J’ai attendu d’être rendu au bas de l’escalier de ciment avant de mordre dans le petit pain. C’est avec un mélange de surprise, d’incompréhension et de désenchantement que j’ai constaté que ce « pain béni » n’avait rien en commun avec celui de ma mère. Il était sans saveur et presque sec. Après cette journée-là, il ne me serait jamais venu à l’idée « d’ambitionner sur le pain béni. »

« Faut pas ambitionner sur le pain béni. » Cette expression m’est revenue en tête récemment lors d’une conversation avec un ami qui, en parlant de la miséricorde de Dieu et du pardon qu’il accorde au pécheur m’a dit, « Dieu est bon mais il n’est pas bonasse. » Je comprends ce que mon ami voulait souligner en faisant cette distinction entre bon et bonasse, mais l’expression me laisse avec le même goût dans la bouche que celui du petit pain béni de mon enfance. Le pardon de Dieu n’est pas du tout comme le pain presque ranci que les marchands qui voulaient bien paraitres aux yeux de Monsieur le curé donnaient aux paroisses parce qu’il était si vieux qu’ils ne pouvaient plus le refiler à leurs clients. Ce pardon est toujours donné gratuitement et sans réserve. Il n’a pas de date d’expiration. Dire que Dieu n’est pas « bonasse » laisse entendre qu’il pourrait se raviser et reprendre ce qu’il nous a donné une fois pour toutes. Même s’il peut ne pas être accueilli, son par-don est total et sans retour. Comme l’étaient les bonnes miches chaudes de ma mère, le pardon de Dieu est pétri avec un amour inconditionnel. C’est son ingrédient principal. Merci maman. Merci Seigneur.  

Tuesday, 8 February 2022

Apprivoiser la mort

Il y a quelques années, quand son cancer du côlon est revenu après quelques mois de rémission et qu’il n’y avait plus d’espoir de guérison, j’ai accompagné mon frère Jean-Guy dans sa maladie. La même année, j’accompagnais mon frère François qui était dans une résidence de soins de longue durée. Il était atteint de la maladie d’Alzheimer et ses facultés diminuaient rapidement. J’allais les visiter tous les deux régulièrement.

La maladie de François me bouleversait. La veille de mes visites avec lui, je dormais très peu et je ne dormais pas beaucoup plus la nuit qui suivait mes visites. Quand j’allais visiter Jean-Guy, ma réaction était tout à fait différente. Même si j’étais triste en pensant à ce qu’il vivait et à la fin qui s’en venait, je me sentais en paix malgré tout et j’étais heureux de passer du temps avec lui. En constatant cette différence dans ma façon de réagir à la maladie de l’un et de l’autre, je me suis demandé pourquoi cette différence. Ce n’était certainement pas parce que j’aimais moins Jean-Guy que François.

Le traumatisme que causait en moi la maladie de François était telle que j’ai ressenti le besoin de chercher de l’aide. Pendant les quelques semaines qu’ont duré les sessions de counseling, il m’est venu à l’idée de faire un « inventaire » de toutes les fois que j’avais croisé la mort dans ma vie. Ce que j’ai constaté, c’est que la mort de certaines personnes m’avait profondément troublé, tandis que d’autres morts, même si elles avaient été difficiles à vivre, ne m’enlevait pas ma paix profonde. Je me suis souvenu, entre autres, d’un autre accompagnement que j’avais fait quelques années auparavant, un homme atteint d’une tumeur inopérable au cerveau. J’ai visité cet homme à toutes les semaines pendant plusieurs mois, mais je ne me suis jamais senti totalement à l’aise avec lui. J’avais pourtant accompagné bien d’autre personnes très malades avant lui. Alors, pourquoi ce malaise? C’est pendant ces session de counseling que j’ai finalement compris pourquoi la maladie de François et celles de certaines autres personnes que j’avais connu dans le passé m’avaient tellement perturbé, beaucoup plus que celle de d’autres personnes dont les maladies n’étaient pourtant pas moins sérieuses.

Ce n'était pas la mort comme telle qui me troublait tant, mais la cause de la mort. Je me suis rendu compte que quand une maladie atteignait le cerveau d’une personne, cela faisait surgir une anxiété profonde en moi. Plus ou moins inconsciemment, j’avais toujours perçu mon cerveau comme le siège de mon identité. S’il était atteint, s’il mourait, c’est mon identité-même qui était perdue.

Prendre conscience de cela m’a permis, avec le temps, d’apprivoiser même les morts qui surviennent à cause de maladies qui atteignent le cerveau. Elles ne me hantent plus comme elles le faisaient, sans que je le sache, auparavant. Quand je visite François maintenant, je peux le faire sans que ma paix profonde soit affectée. J’ai aussi compris que l’identité de François et la mienne ne dépende pas de notre cerveau. Même sans ses facultés mentales, François demeure la personne unique qu’il a toujours été et qu’il sera toujours… même après sa mort. La mort n’a pas de prise sur qui il est ou qui je suis en profondeur.

Tuesday, 1 February 2022

Sens d'une vie

Je suis allé voir mon frère François vendredi dernier. Comme d’habitude, il dormait. J’ai fait ce que je fais normalement : je me suis assis et je l’ai regardé en me demandant ce qu’il vivait à l’intérieur. Il est presque entièrement coupé de l’extérieur : il ne parle plus, ne reconnait plus personne et ses yeux, quand ils les ouvrent, ne se fixent sur rien en particulier. Avec le temps, j’en suis venu à croire (espérer) que ce qu’il y a de plus profond en lui, ce qui fait de lui la personne unique qu’il est, est toujours là. Alors qu’est-ce qui se passe à cette profondeur où François demeure François?

La question qui est montée dans mon cœur vendredi dernier est celle-ci : « Quel est le sens de sa vie si, extérieurement, elle est réduite à ses fonctions biologiques les plus élémentaires? » Jadis, cette question aurait été accompagnée en moi de colère, de tristesse, et même de révolte. Pas cette fois-ci. J’aime François tel qu’il est. Il est mon frère tel qu’il est, précieux à mes yeux tel qu’il est. Je ne doute aucunement de la valeur de la vie de mon petit frère et ce qui a de la valeur a un sens (une direction) et une raison d’être.

Je sais que François a aimé beaucoup de monde dans sa vie : son épouse Rita, ses frères, sa famille élargie, ses amis, ses voisins… Cet amour-là n’est pas disparu avec ses facultés cognitives et motrices. Un amour vrai a des racines trop profondes pour disparaître ainsi. Ce pourrait-il que le cœur profond de François entretienne un dialogue incessant avec cet amour? J’ose espérer que oui. Cette amour demeure dans le cœur de François et l’habite toujours. François n’a pas cessé d’envelopper de son amour ceux qu’il aimait et qu’il aime toujours. Voilà la raison d’être de François, le sens de sa vie.

Sunday, 30 January 2022

Grandpapa and the Fonz

At the supper table yesterday, I asked my granddaughter Katherine if she would bring me a glass of water. While she was heading towards the kitchen to do so, Victor, her little brother, lifted his empty glass and said, “What about me?” Katherine replied, “Grandpapa is a guest, and we serve guests, but you can get water yourself.”

Later, as the conversation turned to designs on tee-shirts. Victor got creative and exclaimed, “Wouldn’t it be great to have a whole lot of kids wearing the same design on their sweater. It could be grandpapa holding up his thumbs like the Fonz and the caption could read, “J’aime grandpapa!”    

My granddaughter Katherine got to know her great grandfather Ernest before he passed away a few years ago. She called him “grandpapa great”. Listening to my grandchildren last night, I thought to myself, “I may not be able to claim the title “grandpapa (the) great” but being treated royally as a guest of honor by my grandchildren and being considered worthy by them of featuring prominently along with a pantheon of superheroes and celebrities on tee-shirts was certainly honor (and joy) enough for me.      

Wednesday, 26 January 2022

Réchauffer les coeurs

Moins 22°C en ce moment – moins 28°C si l’on tient compte du facteur vent. En bon canadien, « Y fa fret! » Je ne peux pas m’empêcher de penser à ceux pour qui la chaleur n’est pas un acquis. Il y a, évidemment, les sans-abris. Il y a aussi les pauvres qui doivent choisir entre augmenter leur facture de chauffage ou acheter de la nourriture. Récemment, un octogénaire qui vit sur une maigre pension dans un appartement mal isolé contre le froid, me disait qu’il n’avait pas mis le chauffage depuis quatre ans. Il faut que la société tout entière soit « fret » - un froid qui rend insensible à la souffrance des autres - pour que des personnes vivent dans ce genre de situations année après année. Dans ces personnes si souvent laissées pour compte, le froid ne doit pas atteindre que le corps; l’indifférence des autres doit les pénétrer jusqu’au cœur.

Je pense aussi aux personnes malades et isolées qui n’ont personne qui vienne à leur rencontre pour leur réchauffer le cœur par leur présence. Quand Jésus m’invite à visiter ces personnes, il me demande de leur apporter un feu qui éclaire leur vie et réchauffe leur cœur.

Il y a deux façons de faire cela. Je peux venir à elles en portant une chandelle allumée. Elle n’éclaire pas beaucoup et ne dégage pas beaucoup de lumière mais cette petite flamme n’est pas négligeable. Elle me permet de voir et de reconnaître dans la personne que je visite un frère ou une sœur qui a besoin de ma présence et de ma compassion. Pour la personne visitée, la nuit et le froid perdent alors un peu de leur mordant. Il y a une autre façon de faire. Je peux être comme une bûche déposée dans un feu de foyer qui se laisse lentement consumer pour devenir elle-même feu. La chaleur et la lumière qui se dégage alors est infiniment plus grande que celle de ma petite bougie.

Quand Jésus nous invite à le visiter dans les malades et les personnes âgées, il nous invite aussi à progressivement passer de l’un à l’autre : prendre de plus en plus conscience que la petite flamme de ma chandelle ne suffit pas; ce qui est nécessaire pour vaincre le froid et les ténèbres est un brasier que seul Dieu peut allumer et nourrir. Il nous faut laisser le feu de l’amour de Dieu nous consumer pour devenir un avec le brasier qui est le seul à suffire.  

Thursday, 20 January 2022

Rainbow in Heaven

Saint Peter was at his desk when I lined up to wait for my turn to be processed to enter Heaven. The lineup was long, but things moved along quite swiftly. At first, I was a bit leery of the people in the lineup. I kept my distance from the one in front of me – the reglementary 2 meters – and checked to make sure the one behind did the same. I didn’t want to catch COVID just as I was arriving at my destination. I certainly wanted to leave all of that stuff behind. I relaxed when I saw that everyone was diligently following sanitary prescriptions.

The crew at the Pearly Gates was very efficient and in no time at all, I was standing in front of Saint Peter. He welcomed me with a warm smile and said, “Glad you made it Gilles. I was expecting you.” He opened the big book on his desk and, with his finger, scrolled down the list of names on the pages reading out loud, “Caldwell, Campo, Cannon, Capello…” He finally found what he was looking for, “Côté… Gilles Côté. There you are.” I looked down and saw that my name was indeed there, properly punctuated with the correct accents in their proper places.

In the column to the right of my name were instructions I could not quite make out. Saint Peter read them silently, and when he had finished doing so, he pressed a button on his desk. As soon as he did, the Pearly Gates started moving at an incredible speed and when it stopped, I could see a beautiful door right in front of me. It was painted a wonderful shade of blue, the type of blue that always made me feel happy and peaceful inside whenever I saw it. Saint Peter pointed to the door and said, “That’s your door.” As I contemplated it, I knew I was in the right place. No other colour would have been suitable for the door giving access to Paradise.

As I started walking towards the blue door, I noticed that there were other doors lined up on either side of it as far as the eye could see in both directions. Some of the doors were also blue, but of a different hue than mine. Many were not blue at all. I could see yellows, browns, reds, purples, greens and even colours I did not recognize and could not name.

I turned to Peter with a puzzled look on my face. He knew what was on my mind and said, “Those other doors are for the other arrivals today.” “My goodness!” I replied, “I didn’t know so many people did not make it into Heaven!” I was convinced that a door of a different colour than mine, and certainly not the kaki door that was next to it, could give access to Heaven. All of those doors had to lead, I was certain of it, to less desirable places.

Again, Saint Peter read my mind and explained, “Every arrival expects the door to Heaven to be painted a certain colour. So we oblige them and have their door painted the colour they fantasize. Once they are inside, we bring them to the garden in the middle of Paradise and let them contemplate the rainbow that arches over it. Eventually, they come to understand that the Light is a communion of an infinity of colours.  

Monday, 17 January 2022

Questions

I once had a conversation with a parent when I was teaching religious ed. I remember sharing with him that I felt it was important to teach students how to ask questions about their faith. His response was blunt and unequivocal: “You are not there to teach them how to ask questions, but to give them the answers.” In other words, according to him, my task was to transmit a set of beliefs, those held by the Magisterium of the Church. He had grown up, as I have, with the equivalent of the Baltimore Catechism in which questions were only used as a pretext to provide the “right” answers. I suspect that, in his mind, asking questions was potentially detrimental to faith because it left the door open to doubts. I knew that gentleman well and never questioned the fact that he had a deep faith. I was, however, taken aback by his reaction.

When I was in grade school, I was required to learn several questions and answers in “Le petit catéchisme” which was the Québec version of the Baltimore Catechism. Each school day, I would read the assigned questions and answers twice and, because I had a good memory, I could then recite them verbatim when I got to class. By the end of the day, I had forgotten both the questions and answers. They were quite meaningless to me. I recall that my main motivation for memorizing them was to avoid being rapped on the fingers by the ruler the teachers used to “reinforce” her lessons.

I was recently reading a book that mentioned the frequency with which Jesus asked questions in the Gospels – 183 according to the author. He also noted that Jesus gave his own answer to only three of these questions. As for the remainder, he let those he was talking to wrestle with their own answers. In other words, for Jesus, the questions were far more important than the answers. Questions must burrow deep within a person’s heart before meaningful answers can emerge. Jesus would have been in trouble often in my primary school classes since he seemed to have had only half of the assignments ready most of the time.

I think that if I were to teach religious ed now, I would make it a point to ask my students each week to come back the following week with their own answers to a different one of Jesus’ 183 questions. What wonderful discoveries they could then make about themselves and their faith!   

Saturday, 15 January 2022

Super Grandpapa

Grandparents must be creative to earn their place in a pantheon of marvelous legendary superheroes equipped with a panoply of special powers that can attract and astonish young imaginations.

Last week – on January 6th to be specific – Diane and I decided to have a little adventure with Catherine and Victor before school started the following Monday. Because of the prevailing pandemic restrictions, our options were quite limited. We settled for a car ride and a stroll across the Adàwe Crossing and in the park at the end of Somerset East. The Rideau River was not yet completely frozen over and there were still quite a few seagulls and several ducks swimming in the water.

I was acutely conscious of the fact that this little adventure was not as exciting as watching or reading about superheroes who could fly at incredible speed, leap over tall buildings, morph into amazing shapes, manipulate space, time, energy… I figured I needed to enhance the outing with something that I knew they both enjoyed enormously. I bought a box of ice cream Drumsticks for them to bring home. I told them they would have to ask their dad if they could have one for dessert after lunch that day. Disappointed, they reminded me that dessert was never on the menu at lunchtime. My plan to enhance my superhero status was in jeopardy. I needed to come up with a means of salvaging it. I told them, “Drumsticks are such special treats that they deserve recognition. I, therefore, declare that today is International Drumstick Day!” I assume that Kent, their dad who diligently prepares their lunch most days, could not deny his children the privilege of celebrating the first-ever International Drumstick Day and made an exception to the no-dessert at lunchtime rule.

Add a reminder in your calendar on January 6th, 2023, and don’t forget to celebrate International ice cream Drumstick Day!

Friday, 7 January 2022

Faces of Jesus


 I remember one edition of the Time magasine that featured a mosaic made up of various depictions of the face of Jesus. I have always wondered why people pictured him in so many diverse ways and how the image they have of his face influences their relationship with him.

Below are some of those depictions gathered on the Internet. Which one is yours?